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La vie entre les mains

Sur la route des retrouvailles avec sa vraie nature individuelle, on rencontre la gravité. La gravité n'est ni la tristesse, ni le malheur; elle n'est ni un sentiment ni un état d'âme. C'est une conscience juste de la difficulté de la tâche à accomplir. On peut s'interroger sur le sens ds mots "malheur" et "bonheur": ils traduisent trop souvent un vécu purement émotionnel, inconsciemment entretenu pour fuir la monotonie de l'existence. Peut-être sentez-vous cela confusément en vous...

Beaucoup, et je fus de ceux-là, consolident une certaine image du bonheur par une succession de sentiments forts et de situations fortes. Le bonheur repose ici sur des facteurs extérieurs: quand ils disparaissent, le bonheur disparaît aussi. C'est l'effet "boomerang": au moindre accroc, ce bonheur s'effrite. Plus grande était la joie, plus grande sera la peine.

A force de répéter ce processus, de nous y heurter, nous pouvons entrevoir sa fragilité: si la dépendance vis à vis de l'extérieur est trop grande, elle est à coup sûr dangereuse pour l'équilibre et la santé.

Résumons de cette façon: pour retrouver notre vraie nature individuelle, exerçons-nous à l'intrépidité.

Qu'est-ce que l'intrépidité ?

C'est tout d'abord un courage, car avec elle nous rencontrons le poids des pensées mentalisées, les couches successives d'émotions stagnantes, d'angoisses inavouées, de peurs refoulées, de tensions figées dans le corps.

Ce courage autorise et accepte la confrontation avec nos actes et avec nos motivations: il permet aussi de mettre en application nos aspects les plus cachés dans la vie quotidienne.

Pour le mettre en pratique, il faut sentir un appel irrésistible à partir d'une conviction incontournable. C'est ce que j'appelle l'engagement vrai, qui nécessite une confiance totale. Certains tournants dans la vie nécessitent des choix vitaux: une femme rencontre l'homme de ses rêves. Elle est mariée... Que va-t-elle faire ? un PDG en a assez du poids de son rôle social, il aspire à changer de vie, le fera-t-il ?

Vivre sa propre intrépidité nécessite donc, tôt ou tard, cinq principes en inter-relation: une écoute de soi, une conviction intime, une confiance absolue, un engagement total et une rigueur permanente.

L'intrépidité sert à se libérer du roman qui entoure notre vie, de l'image que nous avons de nous, et des obligations que nous nous créons. Notre mental aime tant les romans... Certains escaladent les plus hauts sommets, d'autres explorent le fond des mers. Partir à la reconquête de soi est une aventure plus périlleuse encore, mais ô combien plus gratifiante. Nos facettes cachées (car bien souvent inavouables) apparaissent peu à peu à la conscience, et créent bien sûr des turbulences? Il est nécessaire alors de s'en extraire et de prendre du recul. On devient observateur, témoin de soi-même, et l'on commence à prendre conscience de choses que l'on n'avait jamais vues... On entrevoit les deux modes de censure du mental: la culpabilisation suite à un désir réalisé et la frustration suite à un désir refoulé. Dans les deux cas il s'agit d'un jugement de valeur exprimé par le caractère morbide du mental, soit par anticipation, soit a posteriori.

Se libérer de ce fonctionnement, si néfaste pour la santé, mais si profondément ancré dans nos habitudes, doit devenir le but de notre vie.

L'intrépidité exige le discernement, au sens philosophique et non pas moral du terme. Face à un acte possible, le discernement ne consiste pas à s demander: "Est-ce convenable ou pas ?" (références aux règles collectives), mais plutôt "Cela va-t-il me faire plus de bien que de mal ? " (référence à la vraie nature, dans un face-à-face avec soi-même).

Il ne s'agit pas là d'oublier les autres, ni de nier les réactions provoquées par nos actes: la décision de faire ou de ne pas faire les prend en compte, mais pour des raisons de responsabilité et non de moralité. Le discernement est une réflexion qui épouse toutes les composantes individuelles et spécifiques d'une situation donnée et non une décision dictée d'avance par les lois collectives. En ce sens, suivre sa vraie nature exige une vigilance continue.

Se rencontrer vraiment et extraire sa vraie nature individuelle de l'emprise des pensées mentalisée est donc une renaissance parfois difficile.

Au début, la question suivante est inévitable: "Ma nature individuelle est-elle toujours belle?" Et l'inquiétude naît. Les messages intérieurs sont en effet rarement conformes à l'image que vous en avez, et aux attentes des autres. A cet instant, vous testez votre intrépidité.

Mais il est certain qu'il n'y a pas de réponse générale. Chacun découvre sa propre réponse: la vraie nature individuelle est par vocation unique.

L'obstacle majeur est l'idée préconçue du "beau" et du "laid", du "bien" et du "mal". le regard critique porté sur sa propre vie et sur les autres demeure un frein à l'intrépidité.

(p.33-36, La vie entre les mains, Guy Trédaniel Editeur)

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